Comment motiver durablement mes équipes ? Comment mobiliser un Codir ? Voilà l'éternelle question des managers de tous les horizons. 

Bien sûr, il y a tout le micro management qui permet de jouer sur la motivation : bien reconnaître les efforts par des récompenses, primes, valorisations, adapter sa communication (analyse transactionnelle) ou son mode de management (stratégie des alliés ou management situationnel par exemple).

Mais l'on peut aussi monter d'un cran et essayer de comprendre ce qui motive les hommes et comment un manager, avec ses outils, peut s'en servir.

 

Pourquoi les hommes bougent ? Le récit personnel

Une étude formidable de Joseph Campbell (Le héros aux 1001 visages) montre que toutes les civilisations, à toutes les époques, se racontent des histoires et même, découverte incroyable, que c'est toujours la même !

Cette histoire, en bref, est celle d'un héros que l'aventure appelle, qui commence par y résister puis passe un seuil lors d'une première épreuve, encouragé par un mentor. Ensuite, il mène un ou plusieurs combats remarquables et enfin revient à son point de départ, grandi et transformé, avec un message à délivrer aux hommes : prenez Bouddha ou Frodon dans Le Seigneur des Anneaux, le schéma est tout à fait explicite.

Campbell explique la nécessité de l'histoire par le besoin qu'a l'homme de se rassurer face à sa propre mort en vivant par procuration les vies d'autres personnes, fictives ou réelles. 

Il explique la nécessité de CETTE histoire parce que c'est celle qui correspond à l'aspiration profonde de l'homme : sentir que son bref passage terrestre a du sens et est utile au-delà de lui-même.

A retenir : si vous voulez qu'une personne soit motivée, il ne faut pas lui raconter des histoires (ce n'est suffisant que pour les enfants), mais lui permettre de construire lui-même l'histoire de sa vie.

En temps que manager, demandez-vous ce que vous avez fait vivre à votre collaborateur et qu'il pourra raconter le soir en rentrant chez lui.

Seulement, si le principe est séduisant et facile à comprendre, il est difficile à mettre en oeuvre pour un manager qui a plusieurs personnes à manager (parfois des milliers), et qui surtout n'a pas le pouvoir magique de générer ce récit.

Il faut donc un modèle de management général qui sera la toile de fond de son système d'animation et qui créera les conditions nécessaires pour que les individus construisent leurs récits personnels : c'est le modèle de l'AVENTURE.

 

Comment créer les conditions de la motivation : le modèle de l'aventure

Pour expliquer le modèle de l'aventure, nous avons à nouveau besoin de recourir au conte. Celui de la quête du Graal et du roi Arthur est à ce titre exemplaire. Le Roi Arthur nous apprend comment intégrer les motivations personnelles à la réalité en trois grands enseignements :

 

D'abord, avoir raison est insuffisant

Arthur est roi d'un peuple organisé jusque-là en clans autonomes et qui doit maintenant faire face aux invasions barbares, constituées d'immenses armées. La solution raisonnable est évidente, il faut unir les clans.

Pourtant cette union ne vient pas, de la même façon qu'elle est intervenue trop tard en Gaule dans les mêmes conditions. Pourquoi ? Parce que changer suppose de renoncer à ce que l'on connaît et qui est confortable pour aller vers une situation inconnue et risquée. Et tant que la menace n'est pas aux portes de la ville, les privilégiés du système en place vont la nier ; et comme c'est eux qui ont le pouvoir….

L'histoire de Vercingétorix, dans un contexte presque identique à celui d'Arthur, montre combien la menace (romaine) est insuffisante pour que la solution pourtant évidente (l'union) se fasse.

 

Dans nos entreprises, c'est la même chose : une modification du contexte (réglementaire, concurrentiel, monétaire, ou autre) impose des changements indiscutables sur le papier mais qui perturbent nécessairement l'ordre en place. La menace ne génère de la mobilisation que trop tard et généralement pour refuser la réalité : exemple des subprimes.

LE COUP DE GENIE d'Arthur est de proposer la quête du Graal. Le Graal c'est la vie éternelle, c'est-à-dire un élément de valeur pour le peuple, mais si difficile à atteindre qu'il faut s'unir pour l'obtenir. Autrement dit, Arthur a fait l'effort de se demander ce qui animerait les hommes plutôt que de se limiter à ce dont ils ont besoin.

Dans votre équipe, il faut faire comme Arthur et vous demander ce que vos collaborateurs ont à gagner, à apprendre de votre solution. Et vous verrez que les objectifs sont souvent des préoccupations de chef et qu'elles ne correspondent que très rarement aux préoccupations du terrain. 

Michel et Augustin est un très bon exemple d'une entreprise qui a su donner du sens et un état d'esprit particulier, au delà de ses produits et de ses performances économiques.

 

Ensuite, il faut comprendre que les difficultés sont souhaitables et même indispensables

Le Graal est quasi hors d'atteinte, et sa recherche est semée d'immenses difficultés : chez Arthur ce sont des dragons, des hydres à quatre têtes ou d'obscurs labyrinthes.

Dans nos entreprises, le Graal c'est votre ambition. Et si elle est bien choisie, elle est permanente, inatteignable et comporte de très grandes difficultés : la modification d'une organisation, la mise en place de SAP, la réussite d'un audit, etc…

LE COUP DE GENIE d'Arthur, c'est de comprendre que les difficultés sont le moteur de la motivation de ses chevaliers, et que, non seulement il ne cherche pas à éviter les dangers, mais qu'il en fait le coeur de sa politique. La difficulté, prise de front, est un remarquable levier de motivation, comme nous le rappelle également l'histoire du Mammouth.

Dans votre équipe également, ne minimisez pas les difficultés ! Elles sont le sel de votre aventure ! Il faut un Graal pour avoir une raison de prendre des risques, mais ce sont les dragons qui transforment les chevaliers en héros.

Ce qui fait que nous admirons les héros du Vendée Globe (ici François Gabart, vainqueur en 2013), c'est que l'épreuve est difficile… On n'en parlerait pas si elle était à la portée de tous.

 

Enfin aider, mais pas trop

Conscient que ses chevaliers ne sont pas aptes à tuer des dragons, Arthur comprend vite qu'il faut les aider. Sans quoi l'aventure tournera au suicide et ne risquera pas de mobiliser. Il demande donc à Merlin, le magicien, de donner à ses chevaliers les potions et outils magiques pour les aider.

LE COUP DE GENIE d'Arthur est que la potion aide et donne confiance mais ne suffit pas. Le courage et l'habileté restent indispensables. Ainsi dans James Bond, Q refuse des gadgets à James et ne lui en donne que trois ou quatre, strictement nécessaires. De même dans Astérix, Panoramix donne une potion magique qui rend fort, mais pour des missions qui nécessitent aussi d'être intelligents, solidaires et courageux.

Pour votre équipe, vous allez vous mettre en quatre : solliciter les services supports, organiser des formations voire faire appel à des consultants. Oui, mais veillez à ce que tous ces dispositifs n'enlèvent pas leur mérite aux gens !

Q dans James Bond est la caricature de ce qu'est le magicien pour le héros !

 

Et puis aussi

Comme le Graal est loin, il faut un épisode pour chaque dragon et réunir les chevaliers autour de la table ronde pour qu'ils puissent se raconter leurs histoires… Et là, la boucle est bouclée avec la nécessité d'alimenter le récit personnel des humains. En entreprise, cela nécessite de mettre en place un système d'animation efficace pour donner de la vie à votre Ambition. C'est en particulier la clé pour animer et récompenser les alliés.


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